Blogbeitrag zum HEKS-Film 2023: Ferlo – Auf der Suche nach einem neuen Gleichgewicht
Christian Bobst
Article de blog de Corina Bosshard du 02.08.2023

«  Je suis une femme qui travaille  »

«  Je suis une femme qui travaille  »

Pour réaliser le dernier film de l’EPER, nous sommes allés à la rencontre des éleveuses et des éleveurs peuls dans le nord-est du Sénégal. Caméra à l’épaule, nous avons suivi pendant plusieurs jours Oumou Sow, la protagoniste principale du film. Sous un soleil de plomb dans la savane du Ferlo, nous n’avons pas seulement sué à grosses gouttes : nous sommes restés bouche bée devant l’énergie de ces femmes peules.  

Il est six heures du matin lorsque nous arrivons dans la cour en bordure du village de Barkédji où vivent Oumou Sow, son mari et leurs cinq enfants. Nous avons avec nous notre matériel vidéo. Les premiers rayons du soleil apparaissent à l’horizon. Un vent chaud souffle déjà. Au loin, un muezzin entame son appel à la prière. Un coq lui répond. Bientôt, des chiens et un âne se joignent à lui.  
Corina Bosshard, Kampagnenkoordinatorin
Corina Bosshard

Corina Bosshard, coordinatrice des campagnes à l’EPER 

Rahel Grunder, la réalisatrice du film, essaye d’enregistrer ce concert matinal, tandis que Christine Munz, la cadreuse, se met en place avec sa caméra. Oumou Sow et son mari Mamadou sont déjà debout. Oumou vient d’allumer un feu. Elle commence à piler de l’oignon dans un petit mortier. Elle prépare la farce des baguettes qu’elle vendra d’ici quelques heures au marché au bétail de Barkédji. 

Barkédji est un village du Ferlo, situé dans le Sahel. Dans cette région, l’eau est très rare. Il ne pleut que 300 mm par an, et ce, uniquement pendant la saison des pluies, entre juillet et septembre. La savane se couvre alors d’un tapis de verdure. Les animaux des familles peules qui y vivent trouvent suffisamment à manger et donnent beaucoup de lait. Mais plus la saison des pluies se fait attendre, plus l’herbe se fait rare. Quand il n’en reste plus un brin, les Peul·e·s rassemblent tous leurs biens et les mettent, avec leurs enfants, sur une charrette avant de partir en direction du sud avec leurs troupeaux, à la recherche de nouveaux pâturages et d’eau. Ils ne reviendront qu’au début de la saison des pluies suivante. 

Blogbeitrag zum HEKS-Film 2023: Ferlo - Auf der Suche nach einem neuen Gleichgewicht
Christian Bobst

Nous ne faisons plus les choses comme avant

Toutefois, ce système est menacé par les changements climatiques. Dans le Ferlo, la saison des pluies commence chaque année un peu plus tard et il pleut de moins en moins. La nature s’adapte. Les buissons épineux et les herbes invasives, boudées par les bêtes, se multiplient. Pendant le tournage du film, fin février, les températures atteignent 42 °C. Le paysage est déjà très aride. Cette situation ne laisse rien présager de bon pour les Peul·e·s, qui possèdent souvent des centaines de vaches, mais aussi des moutons et des chèvres. Les éleveuses et les éleveurs doivent mener paître leurs troupeaux toujours plus loin et sur des surfaces toujours plus grandes. En raison des ressources naturelles limitées, les conflits se multiplient. 

« Nous essayons de nous adapter aux changements climatiques, raconte Oumou Sow lors d’un entretien. Nous faisons les choses différemment. » Il y a quelques années, son mari et elle ont décidé d’abandonner la vie nomade. Ils sont devenus sédentaires, notamment pour permettre à leurs enfants d’aller à l’école toute l’année. Mais la famille doit trouver des sources de revenus alternatives pour tenir durant la saison sèche. Oumou joue un rôle essentiel en la matière. 

Une femme qui travaille

Lors de l’entretien, elle se présente ainsi : « Je suis une femme qui travaille. » Cette affirmation est tellement vraie. Durant les dix jours que nous passons à la filmer, elle ne s’arrête pas un instant. Elle porte le lait de ses vaches à la laiterie, prépare de petits gâteaux à partir de jujubes sauvages et des glaces à partir de jus d’hibiscus et de baobab. Elle récolte les légumes de son potager, vend ses produits au marché. Elle se rend également aux réunions du groupe de crédit et d’épargne et aux assemblées du village, lors desquelles la convention sur l’utilisation des terres est débattue. Même en plein cœur de l’après-midi, quand une chaleur torride s’abat sur Barkédji, Oumou ne s’arrête pas : elle tient sa comptabilité, en listant recettes et dépenses pour calculer ses gains. Ces activités sont d’autant plus remarquables quand on sait qu’il y a quelques années, Oumou ne savait ni lire, ni écrire, ni compter. Enfant, elle n’était pas allée à l’école et avait été mariée à dix ans. 

Le changement ne viendra pas des autres  

Tous ces changements sont possibles grâce au Centre d’études de recherche et de formation en langues africaines (CERFLA), une organisation partenaire de l’EPER qui soutient les habitant·e·s du Ferlo depuis la fin des années nonante. Elle propose des cours d’alphabétisation, promeut les organisations de base, développe des revenus alternatifs et encourage la commercialisation des produits locaux et l’élaboration de conventions pour l’utilisation des terres. 

Tout ce que le CERFLA a réalisé en 25 ans est vraiment remarquable. Aujourd’hui, il travaille avec neuf organisations de base et groupements d’éleveuses et d’éleveurs locaux, qui comptent 7000 membres actifs, dont 80 % de femmes. Oumou est l’une des nombreuses femmes qui, grâce au CERFLA, ont pris leur destin en main. « Les gens d’ici ont pris conscience que le changement ne viendra pas des autres : il doit venir d’eux », affirme Safiatou Baldé Loum, secrétaire exécutive du CERFLA.  

En regardant Oumou, on se rend compte à quel point ce « changement » est un travail long et progressif. Il nécessite de la persévérance. Surtout, il s’agit d’une transition que les populations doivent accomplir elles-mêmes afin de relever sans cesse de nouveaux défis, comme les changements climatiques. 

Lunchkino 2023: Ferlo – Auf der Suche nach einem neuen Gleichgewicht
Ciné-lunch de l’EPER 2023

Pour en savoir plus sur Oumou Sow, les éleveuses et les éleveurs peuls du Ferlo et le travail du CERFLA, regardez le nouveau film de l’EPER « Ferlo – À la recherche d'un nouvel équilibre ».

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