Femmes bureau Honduras
EPER
Honduras

Renforcement de l’autodétermination et de l’autonomie

Aide aux femmes victimes de violences au Honduras

Dans un contexte de grande violence au Honduras, notamment conjugale, le projet de promotion et de défense des droits humains (ProdeHonduras), cofinancé par l’Union européenne, encourage la participation des femmes aux processus de contrôle social du suivi des plaintes, en collaboration avec des organisations de défense des droits des femmes. 

Situation

Le Honduras figure parmi les pays les plus dangereux au monde, avec l’un des taux d’homicides les plus élevés pour un pays hors zone de conflit. L’observation des pratiques judiciaires en matière de violence contre les femmes dans trois municipalités du département de Choluteca en 2021 révèle des lacunes de taille et le fait qu’il n’existe pas de tribunaux spécialisés dans la lutte contre la violence domestique. Dès lors, agir sur la formation des dirigeant·e·s communautaires et créer un tribunal dédié aux violences faites aux femmes constituent un défi de taille. 

Formation de groupes de surveillance

Dans les départements de Choluteca, Francisco Morazán et Cortés, deux associations locales spécialisées dans la prévention de la violence domestique ont formé des groupes de surveillance pour qu’ils puissent examiner la (non) réponse des autorités municipales, judiciaires, policières et sanitaires face aux plaintes pour violation des droits et la qualité des services de santé publique pour les femmes. Des espaces pour les femmes ont été créés, afin qu’elles puissent déposer leurs plaintes. 

La vocation finale de ce travail est de faire en sorte que, dans le cadre de l’exercice de leurs responsabilités, les autorités locales et nationales entrent en matière lorsqu’une plainte est déposée, et qu’elles répondent ainsi aux demandes et aux droits des femmes.  

En 2021, l’Asociación de Mujeres Defensores de la Vida (Association des femmes défenseuses de la vie, AMDV) a mis en place un mécanisme de suivi social de l’application de la loi contre la violence domestique auprès des opérateurs de la justice. Un réseau de femmes a collecté des informations auprès des bureaux municipaux de femmes et des tribunaux des municipalités d’Apacilagua, d’El Corpus et de Namasigüe. 

Mission impossible 

Les différents commissariats de police visités n’ont pas rechigné à fournir des informations ni tu celles dont ils disposaient : de nombreuses violences domestiques ont effectivement été signalées par des femmes. Mais la plupart du temps, celles-ci ne sont pas enregistrées. Les femmes sont simplement envoyées au tribunal de paix de la même municipalité, qui ne prend en compte que les cas enregistrés ! 

Le plus grand nombre de plaintes concerne la violence psychologique, suivie par la violence physique. Sur 34 plaintes déposées, 14 cas ont été abandonnés par les victimes (41 % du total) en raison de divers facteurs, parmi lesquels les coûts élevés du recours au tribunal, les victimes dénonçant le manque de rapidité dans l’examen des cas et le fait qu’elles doivent trouver elles-mêmes les moyens d’apporter la convocation à l’auteur·e des violences, ce qui met leur vie en danger. Sur le nombre total de cas enregistrés, un seul a abouti à une condamnation, ce qui équivaut à 3 % des cas présentés.     

Le numéro d’urgence 911 continue de recevoir des appels pour des cas de violence, mais la plupart d’entre eux ne sont pas traités immédiatement en raison de facteurs logistiques et géographiques.  

Plusieurs constats et enseignements ont été tirés de l’exercice de suivi de 2021 :  

  • Dans certains cas, les plaintes pour violence sont déposées par des membres de la famille des victimes, ce qui constitue un pas en avant dans la reconnaissance du fait que le premier cercle de soutien pour la femme agressée est sa famille.    
  • La violence domestique et intrafamiliale augmente dans toutes les municipalités ayant participé à l’exercice et la situation s’aggrave lorsque les femmes se présentent devant les tribunaux pour une conciliation. C’est pourquoi les femmes devraient être accompagnées afin qu’elles puissent bénéficier de la conciliation, plutôt que de subir davantage de violence, ce qui, dans les pires cas, peut conduire au féminicide. 
  • À Choluteca, les signalements de violence à l’égard des femmes ne sont pas consignés. 
  • Dans les municipalités d’Apacilagua et d’El Corpus, le poste de police est presque toujours fermé, de sorte qu’un dépôt de plainte n’est pas possible.  
  • Parmi les trois municipalités, Namasigüe se distingue par le plus grand nombre de plaintes, ce qui peut indiquer que les femmes participant aux processus de formation reconnaissent la violence et sont encouragées à la dénoncer. Le travail des spécialistes qui accompagnent les femmes victimes et survivantes de violence dans les municipalités a joué un rôle important.   
  • L’une des principales préoccupations d’AMDV, en tant qu’organisation de femmes, est que les données relatives aux dénonciations ne correspondent pas aux manifestations de violence exprimées par les femmes, et qu’il est nécessaire de continuer à travailler sur la promotion des dénonciations et sur le parcours à suivre jusqu’à la condamnation.  
Commissariat police
EPER

Défense des droits des femmes migrantes et déplacées  

La Mesa de Mujeres Migrantes y Desplazadas (Table ronde des femmes migrantes et déplacées), une autre organisation partenaire de l’EPER, également soutenue par l’Union européenne, réalise une veille sociale dans les départements de Francisco Morazán et Cortés. Cette idée est née de l’initiative de trois organisations emblématiques : Grupo Sociedad Civil, Asociación Calidad de Vida et Visitación Padilla, lors du départ de la première vague de migrant·e·s du Honduras vers les États-Unis en 2018. 

Dix-huit entités – des organisations de femmes et de féministes, des réseaux communautaires de femmes, des communautés LGBTQI+ des régions de San Pedro Sula, Choloma, Tegucigalpa et La Esperanza – font partie de cette table ronde et travaillent activement à la promotion et à la défense des droits des femmes en situation de vulnérabilité particulière lorsqu’elles migrent ou lorsqu’elles sont déplacées dans un autre endroit du pays en raison de l’extrême pauvreté et de la violence.

Formations et processus de contrôle social  

En partenariat avec le Grupo Sociedad Civil, l’EPER a mis en place trois modules de formation sur la surveillance sociale avec une approche de genre, afin de renforcer les capacités des membres de la table ronde à défendre leurs droits et leurs besoins auprès des autorités locales. Ainsi, la Mesa de Mujeres Migrantes y Desplazadas a mené à bien deux processus de contrôle social avec une approche de genre en 2022. 

De nombreuses formations pour prendre soin des femmes ont déjà été proposées dans cette région, adressées notamment à des femmes déplacées. Ces formations abordent, entre autres, le soutien psychosocial et les droits des femmes. Elles sont données par le gouvernement central, les organisations de la société civile et la coopération internationale.  

Dans la ville de Choloma, l’Oficina Municipal de la Mujer (OMM) a créé une école dans le but de former des personnes à la promotion des droits de la famille.  Elle dispense tout au long de l’année  des formations sur la prévention de la violence domestique, les abus domestiques et les nouvelles masculinités.  

Si le gouvernement a pris ce problème en compte en allouant plus de budget à la lutte contre les violences, des défis subsistent. L'OMM aimerait construire et gérer un centre d’accueil pour les victimes de violence domestique et aurait besoin d’un véhicule pour atteindre les communautés. Elle aimerait poursuivre l’autonomisation des femmes dans le cadre de l’école de promotion des droits de la famille et approfondir la formation sur le thème des nouvelles masculinités. La digitalisation des projets serait aussi nécessaire 

Une autre organisation, Ciudad Mujer, active à Tegucigalpa, offre des consultations médicales pour les femmes (cytologie et mammographie). Les demandes sont nombreuses et il n’est pas toujours possible d’y répondre, faute de moyens.Ciudad Mujer prend aussi en charge les victimes de viol dans les 24 heures suivant l’événement et les accompagnent psychologiquement et juridiquement. 

Ciudad Mujer joue aussi un rôle de conseil et de renforcement de l’entrepreneuriat des femmes dans divers domaines tels que la pâtisserie, le maquillage, la beauté ou la vente de produits alimentaires.  

Discussion
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